Jean-Louis Bentajou, « La main réfractaire » (samedi, 13 décembre 2014)
« La rêverie sur le retard ou le lointain me reconduit souvent vers la Chine – non pas la Chine réelle dont l’obsession fut si meurtrière il n’y a pas si longtemps, mais la Chine de la peinture à l’encre, presque perdue dans ses lointains.
Effet dissolvant et précieux de l’horizon qui ne décrit aucune réalité et les désagrège toutes. Une limite qui ne limite rien et tamise finement le donné.
Trop vite renseigné sur la scène représentée (“les six Kakis” de Mu Chi) que j’ai repérée dès son titre, je me lasserai vite des fruits imperceptiblement différenciés par un pinceau parcimonieux. Pourtant ces formes ne s’épuisent pas à répéter leur identité. Il ne me suffira pas de les reconnaître pour les voir dans la diffraction variée des intervalles et le fond disproportionné qui les pénètre toutes.
Quelques traces d’encre suspendues dans un rectangle de papier effacent les images qui encombraient mon présent. »
Jean-Louis Bentajou
La main réfractaire
L’Escampette, 2004
Mu Chi (Mu Qi), Six Kakis, musée Daitoku-ji, Kyoto
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