Christian Garcin, « Vétilles » (dimanche, 02 août 2015)
Poitiers, mai 2013 – 20 ans de L'Escampette – © Sophie Chambard
« Ce qui manque à la plupart des écrivains qui m’ennuient ou m’indiffèrent, c’est le sentiment de la nature – l’appréhension directe, physique, de la nature dans sa sauvagerie, son altérité, sa puissante étrangeté. Pas en tant que cadre strict du récit (cela importe peu), mais en tant qu’ombre portée sur leur imaginaire, et créant un halo, une épaisseur, une espèce de densité dont leurs mots se trouvent dépourvus.
*
La vieillesse. Le temps qui file. Je vois ma mère ou C. par exemple, et me dis qu’un jour il va falloir s’occuper, en plein chagrin, de sordides affaires de succession, de meubles et d’objets à caser ici ou là. Mais je me vois moi aussi en train de vieillir, parfois j’ai l’impression d’être mon grand-père, je suis un vieillard, mon corps s’affaisse, se ramollit, je ne fais rien pour lutter contre cela. D’autres fois je me sens proche de l’âge de Clément, je sors à peine de l’adolescence, il faut croire que je ne sais plus très bien où j’en suis. Mais de plus en plus je ne peux m’empêcher de vivre le présent comme s’il s’agissait d’un passé, comme si je le voyais depuis un futur non précisé, comme si j’en portais déjà la nostalgie. C’est ce même mouvement, mais inverse, qui fait que je vois parfois mon passé comme si j’y étais à présent, comme si je pouvais aujourd’hui m’y projeter et l’éclairer de ce qui par la suite s’est déroulé. »
Christian Garcin
Vétilles
L’Escampette, 2015
16:25 | Lien permanent | Tags : christian garcin, vétilles, l'escampette
Commentaires
Je me souviens de tout,
je me souviens de rien.
Enfin, de riens, de petits riens,
de beaucoup de riens, de petits gestes
de l'odeur de la pluie sur la terre,
des fenêtres hautes , à mon regard,
avant qu'elles ne s'abaissent insensiblement avec la croissance .
De dessins appliqués, retrouvés des années après
( des signes en forme de petits scarabées )...
de petits récits qui disaient les escargots réfugiés sous
le rebord de la murette de la clôture, le chat gris aux yeux verts,
la grille du jardin :
Quelques lignes au creux de papiers pliés, dans la boîte de couture de ma mère,
aux côtés des élastiques , des rangées d'aiguilles
et de l'oeuf en bois :
On construit quelque chose au cours des ans.
Des fois on oublie que le monde est en marche,
pour soi aussi.
Malgré la distance,
la brèche de l'enfance n'est pas infranchissable.
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RC
Écrit par : rechab | vendredi, 25 septembre 2015