Bernard Noël, « Le même nom » (jeudi, 12 janvier 2017)
Bernard Noël, 8 septembre 2011, Bordeaux © : claude chambard
« — J’ai peur, dit-il en montrant Son livre, il y a là mon nom qui veut me tuer.
— N’aies pas peur, dis-je, tu es déjà mort.
— La peur du nom ?
— Oui, la peur de rien
* * *
Tu vas devenir un nom. Tu l’es déjà. Qui voit l’œuvre de la mort ? Un nom n’est pas un visage. C’est une forme blanche. Un trou plein de rien.
Ce qui disparaît,
ce qui est la langue dans la langue,
l’adieu au sens :
mon corps.
Le nom permet l’indéterminé de la mort.
* * *
J’écris.
Je passe de l’autre côté de mon nom.
Le pas encore et le déjà-plus se
confondent.
J’écris.
je réalise ma mort.
L’usure est usée.
Pourtant, ici même, voici du fait : il restera toujours à l’user.
La pensée de la mort est fuyante,
comme le possible.
* * *
J’écris pour m’abîmer dans mon nom. »
Bernard Noël
Souvenirs du pâle, suivi de Le même nom
Fata Morgana, 1975
17:52 | Lien permanent | Tags : bernard noël, le même nom, fata morgana