Jean-Jacques Viton, « La conjonction de coordination » (mercredi, 18 octobre 2017)
jean-jacques viton, poésie marseille, lecture au [Mac], 2010 © cchambard
« c’est quand nous sommes arrivés
devant la maison
après l’interminable chemin entre les arbres morts
nous avons décroché le lapin blanc
gelé ventru gonflé pendu à un pommier
les yeux comblés de glace
les oreilles rigides
nous aurions dû aussi ramasser l’agneau brun
venu se prendre au piège à renards
camouflé dans la neige
sous le lapin qui servait d’appât
pourquoi on se baladait de ce côté
je ne pense pas qu’on cherchait un sapin
je n’aime pas les sapins
ni sur place ni dans une pièce
toujours peur de me crever un œil en approchant
on est allé plus bas
plus bas que la prairie
où est la ferme au lapin blanc servant de piège
je trouve cette idée de piège ridicule
pourquoi un renard avalerait un lapin congelé
je veux dire plus bas vers la rivière
qui continuait à couler un peu
on hésitait à s’engager sur les troncs d’arbres
des troncs immenses mais pas larges
je n’aime pas non plus jouer les trappeurs
dès que l’on se trouve en hiver dans la montagne
on a fini par trouver un passage plus pratique
on est rentré sans se presser
tenant le lapin par les oreilles
elles fondaient lentement dans nos gants
ici je place un et un peu hésitant »
Jean-Jacques Viton
Accumulation vite
P.O.L, 1994
19:02 | Lien permanent | Tags : jean-jacques viton, accumulation vite, p.o.l