Herberto Helder, « Du monde » (vendredi, 17 avril 2020)
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« Celui qui atteint son poème par ce que les poèmes ont de plus haut,
touche au lieu où c’en est fini du monde : je ne le veux pas
pour le charme, ou l’erreur, dit-il,
je le veux pour l’étoile plénière qui existe à certains endroits de certains poèmes
abrupts, sans indication d’auteur.
Il y découvrit ce que tout cela contenait
d’âpreté :
plutonium, l’abîme.
La lune travaillait à la vitesse de la splendeur.
Les clous vivants au-dedans de la tête, je sais.
Un vase fait sur le vif, soufflé chaud, dit-il, je sais.
Le système du son au plus secret du poème à jamais,
poème intact, de
musique et
d’exaltation.
Où se trouve pour le délire, dans la partie
haute, dévorée par l’or, la partie inhospitalière.
Hanté aussi par le plus simple :
quantité et fraîcheur, un exemple :
les fruits enivrent.
Quelqu’un a dit : l’étoile absolue a pénétré ta douceur.
De traverse en traverse d’os – parce que tu étais vierge – alors elle te transmua,
fils.
La bouche meurtrie par l’air inspiré, l’air expiré.
Brûlé là où la chair se ferme, ou bien ouvert peut-on
dire
comme un trou de matière maternelle.
Un âpre tas de sacs en haut :
des sacs brillants, des sacs de sang amarré.
————
Miroir qui regarde un miroir : image
arrachant à l’image, oh
merveille de sa profondeur même, l’eau vive
que son œuvre enchâsse, lumière tissée
pour qu’on voie la lumière.
————
Œuvre à cette chose ancienne tandis que le monde marche
sur son centre,
comme si chaque point de ton ouvrage formait le cœur du monde. »
Herberto Helder
« Du monde » – 1994
in Le poème continu – 1961-2008
Traduit du portugais par Magali Montagné et Max de Carvalho
Préface de Patrick Quillier
Chandeigne, 2002, réédition, Poésie / Gallimard, 2010
16:22 | Lien permanent | Tags : herberto helder, du monde, le poème continu, magali montagné, max de carvalho, patrick quillier, chandeigne, poésie gallimard
Commentaires
les meurtris sont âpres, profondeur et recherche dans l'âme du poème, image arrachant à l'image, peut-être plus que le sang, jusqu'à l'os, le poème se place au-dessus, vitesse de la splendeur. Je découvre, et j'aime cette recherche
Écrit par : Sophie Marie van der pas | vendredi, 17 avril 2020