Lambert Schlechter, « Ruine de parole »
© : Claude Chambard
« ta mort m’a jeté
dans le domaine du définitif
l’absolu n’est plus un concept
mais le foyer même de la vie
le vide le rien
pendant qu’au jour le jour je vis
(c’est pourquoi je n’écris pas un roman :
il faudrait inventer)
(c’est pourquoi je n’écris pas un traité philosophique :
il faudrait penser)
*
ne pas pouvoir quitter
par le souvenir
le temps de la maladie comme si le malheur
nous avait soudés davantage
que le temps du bonheur
*
je me suis interdit
(n’ai pas pu)
(n’ai pas voulu)
dire tu à ma femme morte
avais peur de perdre la raison
et maintenant cette sorte d’illusion
qu’elle pourrait encore me répondre
me confronter sans concession au néant
n’y a pas consolation
nous avons vécu l’amour
le bonheur le plaisir le malheur la souffrance
la mort
c’est tout »
Lambert Schlechter
Ruine de parole
Phi, en coédition avec Écrits des forges & L’Arbre à paroles, 1993
Commentaires
Magnifiquement juste. Merci.
merci de suivre le blog et d'aimer Lambert.