Françoise Ascal, « Des voix dans l’obscur »
« non
pas de “belles histoires” à raconter les histoires ça vole dans l’air on les capte d’une main joueuse je ne sais pas jouer je n’ai pas de filet à histoires juste du fil à coudre utile pour les plaies coudre et recoudre ce qui bée une spécialité en quelque sorte réparer recoller rafistoler ravauder avec plus ou moins de succès paroles qui tombent et se cassent dans le vide murs qui se fendent toits qui s’écroulent draps qui se déchirent peau qui se fane veines qui éclatent c’est mon lot je pose des mots-sutures sur ce qui souffre c’est une addiction comme une autre
peut-être est-ce mon corps troué que je cherche à rejoindre dans la moindre faille
glisser la langue entre les molécules disjointes mâcher les noms perdus sucer le rien saliver
lèvres closes cimenter l’absence
peut-être est-ce vous qui m’appelez vous qui n’êtes plus
vous qui avez fui sans légendes à hisser dans les livres »
Françoise Ascal
Des voix dans l’obscur
5 dessins de Gérard Titus-Carmel
coll. écri(peind)re, Æncrages & Co, 2015