Claude Dourguin, « Points de feu »
Andrea di Bartolo, dit Solario, La Déploration sur le Christ mort,
Musée du Louvre, cliché A. Dequier - M. Bard
« Dans la Lamentation sur le Christ mort d’Andrea Solario, le fond du panneau, par ses bleus, son paysage de monts et de rivière se dégageant de falaises, évoque Patinir. Une tranquille irréalité, le songe acclimaté ici-bas avec une part de sa force rayonnante, la plénitude radieuse qui nous attend, l’assurance d’un autre pays – où est résolu ce qui nous obsède, où l’on a fait siens les secrets contre quoi nous nous heurtons mais leur charge de mystère nullement niée, présente comme familière sinon domestiquée (à l’instar de certain lion promenant sa majesté parmi les livres.) Des constructions humaines, villes et châteaux en campagne, bois et champs, une connivence tout à la fois humble et glorieuse, chaque élément répond à l’autre sans dureté, nul ne fait allégeance, chacun échange ses qualités plutôt, afin que notre séjour soit plus riche aux marches de l’au-delà. Le peintre murmure, pressent ce qu’affirmera Patinir : que l’ailleurs est atteignable, peut-être même ici, à notre portée. Il suffit de parcourir, le monde s’ouvre à mesure que nos pas nous conduisent. Le rêve . – notre destinée. »
Claude Dourguin
Points de feu
Éditions Corti, 2016