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Gustave Roud, « Un hêtre de juillet »

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Gustave Roud : autoportrait, 1930

 

« Je t’écris dans la lumière amortie d’une fin d’après-midi que j’avais imaginée, je ne sais pourquoi, plus ensoleillée. Que le printemps a donc de peine à s’affirmer ! Les pommiers fleuris semblent attendre on ne sait quel signal libérateur pour épanouir leurs millions de corolles hésitantes : ce n’est pas cette explosion qu’on admire parfois, le souffle un peu coupé devant tant de véhémence. J’espère beaucoup que les jours prochains seront moins réticents, car j’aimerais beaucoup te proposer, au lieu d’un revoir lucensois, une petite fugue vers “L’Étoile” de Chapelle où nous fêterions le charmant anniversaire que tu sais. (mai 1972)

 

J’ai beaucoup repensé à notre escapade de l’autre jour vers les hauteurs et toujours avec un plaisir infini. C’était si réconfortant de retrouver des choses et des lieux aimés. Pour tout dire, je ne croyais guère à la réussite de notre entreprise au départ sous le ciel ambigu, capable de s’assombrir toujours plus ou de s’alléger de ses nuages. Puis tout s’est si bien arrangé – jusqu’à ces merveilleuses touffes de sauges et d’esparcettes qui semblaient rivaliser de naïve splendeur dans leur déroulement le long de notre marche. Depuis combien de mois, d’années, n’avions-nous pas refait ensemble une telle promenade ? (2 juin 1972)

 

Pour moi, c’est comme une espèce de menace latente d’un “hiver à long museau et à longue queue” comme on dit dans le Jorat, et cela deviendrait vite une obsession. Mais il faisait doux cet après-midi sur le chemin qui descend en oblique vers Vulliens. Une ou deux branches se tachent de jaune pâle aux couronnes des hêtres… Il y en a quand on redescend de Villars-le-Comte à Oulens qui a déjà viré à l’or – c’est toujours le premier, disait le gentil Friz R. à un voyageur du bus postal et il avait raison : j’avais fait la même remarque. Sais-tu que j’ai longtemps détesté cet incendie automnal des feuillages ? C’était avec le temps de la floraison, le seul moment où les gens s’apercevaient de l’existence des arbres (et cela dure encore) alors qu’un hêtre de juillet, pour être d’une beauté plus sévère, n’en propose pas moins un spectacle inépuisable. (28 septembre 1972) »

 

Gustave Roud

Un hêtre de juillet

Extrait de sa correspondance avec Vio Martin

Solaire, 1979

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