Santoka, quelques haïkus
sur mon chapeau de bambou
tombe
une fleur de camélia
j’ai du riz
j’ai des livres
j’ai même du tabac
dans mon village natal
au milieu de la nuit
rêvant de mon village natal
les aigrettes de pissenlit se dispersent
le souvenir de ma mère
sans cesse me revient
les hirondelles migrent
voyage après voyage
je chausse mes sandales en paille
de mon journal jeté au feu
pas plus de cendres
que ça ?
j’ai de quoi manger
de quoi m’enivrer aussi
les herbes folles sous la pluie
une libellule part
une abeille arrive
à mon bureau le cœur serein
depuis que personne ne vient
les piments
sont devenus rouges
la neige de printemps tombe
les femmes
sont si belles
plein de gratitude
d’être encore en vie
je rapièce mes vêtements
au réveil de l’ivresse
un vent triste
me transperce
ma gueule de bois
avec les fleurs de cerisier
se disperse se disperse
ah mourir
tranquillement
là où poussent les jeunes herbes
ma mort
les herbes folles
la pluie
Santoka —1882-1930
Journal d’un moine zen — zen, saké, haïku
Traduit du japonais par Cheng Wing fun & Hervé Collet
Moundarren, 2013