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  • Ishikawa Takuboku, « Ceux que l’on oublie difficilement »

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    « J’ai compté les années d’espérance

    et je fixe mes doigts

    je suis fatigué du voyage

     

    Je n’avais pas fini d’écrire l’amertume des vagabondages

    que les mots du brouillon

    sont difficiles à relire

     

    Cette nuit je vais tenter de pleurer tout mon saoul

    – le thé refroidi

    d’une auberge de passage

     

    Le rire d’une femme

    tout à coup me transperça

    une nuit de saké froid dans la cuisine

     

    Se soutenant sur moi

    par une profonde nuit de neige

    la tiédeur de cette main de femme

     

    Elle attendait de me voir ivre

    pour aller chuchoter

    diverses choses tristes

     

    Cette femme qui pleurait dans ma chambre

    était-elle souvenir d’un roman

    ou de l’un de mes jours » 


    Ishikawa Takuboku

    Ceux que l’on oublie difficilement

     Traduit du japonais par Alain Gouvret, Yasuko Kudaka et Gérard Pfister

     Arfuyen, 1989

  • Ishikawa Takuboku, « Fumées »

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    « Joie, l’eau ruisselle de la pompe

    un bref instant

    je vois l’élan de ma jeunesse

     

    Je levais la tête au ciel pur

    l’envie me prenait de siffler

    je faisais ma joie de siffler

     

    Quand tombaient les fleurs

    j’étais le premier à sortir

    vêtu de blanc

     

    Comme une pierre

    dévale la pente

    je suis arrivé à ce jour-ci

     

    Dès le réveil la tristesse

    – mon sommeil

    n’est plus paisible comme autrefois

     

    Le vert tendre des saules

    en amont de la rivière

    je le vois comme à travers des larmes

     

    Je me suis tourné vers la montagne

    sans un mot

    les montagnes du pays sont admirables »

     

    Ishikawa Takuboku

    Fumées

    Traduit du japonais par Alain Gouvret, Pascal Hervieu et Gérard Pfister

    Arfuyen, 1989

  • Ishikawa Takuboku, « L’Amour de moi »

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    «  Quand j’ôte le bouchon, l’odeur d’encre fraiche

    descend dans mon ventre affamé

    et me rend triste

     

    J’ai fait cette prière : Tous ceux

    rien qu’une fois, qui m’ont fait baisser la tête

    je voudrais qu’ils meurent

     

    On a beau travailler, et travailler encore

    la vie ne s’éclaire d’aucun bonheur

    Je contemple mes mains

     

    Ce soir

    j’ai envie d’écrire une longue lettre

    qu’on lira en pensant à moi

     

    La montre que brutalement j’ai jetée

    contre une pierre du jardin

    comme j’aime cette colère d’autrefois

     

    Vent d’automne

    Je ne parlerai plus désormais

    à l’homme que je méprise »

     

    Ishikawa Takuboku

    L’Amour de moi

    Traduit du japonais par Tomoko Takahashi et Thierry Trubert-Ouvrard

     Préface d’Alain Gouvret

     Arfuyen, 2003

     

    On trouvera Ishikawa Takuboku personnage principal du tome II — « Dans le ciel bleu » — de l’extraordinaire roman graphique Au temps de Botchan de Jirō Taniguchi & Natsuo Sekikawa, Seuil, 2004