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Réflexions - Page 2

  • Poème pour MTC et MS

    3a8f560dbb2db4ed2d6d0f1bf5abe7eb.jpegJ’entre dans ma voiture
    j’habite près du cimetière de la Chartreuse
    je pense que je suis fou
    mais je monte dans ma voiture
    par habitude, simplement
    je démarre & quand je suis au bout de la rue
    elle me chuchote une exagération
    les exagérations sont plus vraies chaque jour
    dans le champ de décombres de notre « style de vie »

    Un ami me confie qu’il a décidé de ne plus partir en vacances pour ne plus polluer la campagne.
    Un autre m’appelle en pleine nuit, pour m’expliquer qu’il va adopter un ours polaire.
    Un troisième évite dorénavant de parler de politique.
    Cesare me téléphone de chez Johnny H. à Mérignac. Je dois ne rien dire à la police. Je ne dis jamais rien à la police.
    Johnny H. a une mobylette orange avec laquelle il se rend régulièrement au cimetière de Trensacq pour bavarder avec Bernard Manciet.
    « Nous sommes en guerre », me crie quelqu’un que je ne connais pas dans l’oreille droite.
    « Daisy m’a quitté », me hurle Donald dans l’oreille gauche.
    Ces cris ont des effets très nocifs sur mon état nerveux.

    Je ne peux pas me rendre au pot de départ à la retraite de mes camarades.
    Les « gens qui savent » m’ont rendu fou.

  • De la démocratie, Alexis de Tocqueville

    cdc2fd978f6aeb2308c07737eed31ed4.jpg“Il y a un passage très périlleux dans la vie des peuples démocratiques.
     
    Lorsque le goût des jouissances matérielles se développe chez un de ces peuples plus rapidement que les lumières et que les habitudes de la liberté, il vient un moment où les hommes sont emportés et comme hors d’eux-mêmes, à la vue de ces biens nouveaux qu’ils sont prêts à saisir. Préoccupés du seul  soin de faire fortune, ils n’aperçoivent plus le lien étroit qui unit la fortune particulière de chacun d’eux à la prospérité de tous. Il n’est pas besoin d’arracher à de tels citoyens les droits qu’ils possèdent ; ils les laissent volontiers échapper eux-mêmes(...)
     
    Si, à ce moment critique, un ambitieux habile vient à s’emparer du pouvoir, il trouve que la voie à toutes les usurpations est ouverte. Qu’il veille  quelque temps à ce que tous les intérêts matériels prospèrent, on le tiendra  aisément quitte du reste. Qu’il garantisse surtout le bon ordre. Les hommes qui ont la passion des jouissances matérielles découvrent d’ordinaire comment les agitations de la liberté troublent le bien-être, avant que d’apercevoir comment la liberté sert à se le procurer ; et, au moindre bruit des passions politiques qui pénètrent au milieu des petites jouissances de leur vie privée, ils s’éveillent et s’inquiètent ; pendant longtemps la peur de l’anarchie les tient sans cesse en suspens et toujours prêts à se jeter hors de la liberté au premier désordre.
     
    Je conviendrai sans peine que la paix publique est un grand bien ; mais je ne veux pas oublier cependant que c’est à travers le bon ordre que tous les peuples sont arrivés à la tyrannie. Il ne s’ensuit pas assurément que les peuples doivent mépriser la paix publique ; mais il ne faut pas qu’elle leur  suffise. Une nation qui ne demande à son gouvernement que le maintien de  l’ordre est déjà esclave au fond du cœur ; elle est esclave de son bien-être, et l’homme qui doit l’enchaîner peut paraître. (...)

    Il n’est pas rare de voir alors sur la vaste scène du monde, ainsi que sur nos théâtres, une multitude représentée par quelques hommes. Ceux-ci parlent seuls au nom d’une foule absente ou inattentive ; seuls ils agissent au milieu de l’immobilité universelle ; ils disposent, suivant leur caprice, de toutes choses, ils changent les lois et tyrannisent à leur gré les mœurs ; et l’on s’étonne en voyant le petit nombre de faibles et d’indignes mains dans lesquelles peut tomber un grand peuple...
     
     Le naturel du pouvoir absolu, dans les siècles démocratiques, n’est ni cruel ni sauvage, mais il est minutieux et tracassier.”
     
    Alexis de Tocqueville. De la Démocratie en Amérique, Livre II, 1840 (10/18, 1963).