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Un nécessaire malentendu - Page 92

  • Siegfried Plümper-Hüttenbrink

    100477758.jpg« Ainsi s’écouterait-on lire, jusque fort tard, dans la nuit, du fond de son oreille. À flotter et s’absorber épongeusement – comme seul un buvard sait le faire – au plus creux de ce que serait notre silhouette de lecteur.  L’épelant en aveugle, du bout des doigts se la tâtant hâtivement en tête, la palpant dans sa découpe d’ombre.
    Silhouette de nous-mêmes, elle l’est, à nous faire toucher à nous-mêmes en notre absence. Tactile – absente – muette.
    Penché à la renverse, nous retournant d’entre le froissé des pages, dans un corps tenu en éveil, comme blanchi de son ombre, chu en inertie… Une sorte de poids mort, de gisant dont seule l’ouïe resterait vive, et que serait le corps lisant d’un dormeur qui n’en finirait pas d’enregistrer une espèce d’histoire à dormir debout. »
    Siegfried Plümper-Hüttenbrink
    De la lecture
    (Selon Walter Benjamin et Ludwig Wittgenstein)
    La main courante, 2006

  • Christophe Tarkos

    1906283801.jpg« Je suis un poète français. Je travaille pour la France. Je travaille à la France. J’écris en français. Je serai un poète de la France. J’écris en langue française. La langue française est le peuple français. Il n’y a pas de peuple de France sans la langue de France. La langue de la France n’existe qu’à travers ses poètes, la langue est une langue quand elle est une langue vivante, le poète vivifie la langue, rend la langue vivante, elle est vivante, elle est belle. Le peuple français se définit d’abord par le peuple qui parle français. Le peuple français parle français grâce à ses poètes qui vivifient sa langue. Le poète sauve la langue, sauve le peuple, sauve la France. Le poète qui sera reconnu patrimoine national de la nation, je suis français, j’appartiens au patrimoine national de la France. Je suis un poète de la France. »
    Christophe Tarkos
    Pan
    P.O.L, 2000

  • Rafael José Díaz

    LA SORTIE, LE RETOUR*

    691446098.jpg« La balustrade du rêve au petit jour
    ou dans la nuit haute, blanche, obscure.
    Je sors jusqu’à elle, jusqu’à la mousse qui la recouvre,
    jusqu’à son contact humide, pour voir mes yeux
    ou les tiens entre les branches mouillées
    des saules, pour écouter les voix
    sur l’herbe, dans l’eau qui dort.
    Je reviens à ma chambre et c’est toi
    qui dors, qui parles et tes yeux
    me couvrent du contact humide de la mousse
    de la balustrade du rêve au petit jour
    ou dans la nuit haute, blanche, obscure. »
    Rafael José Díaz
    Le Crépitement
    Traduit de l’espagnol par Bernard Banoun*,
    Jacques Ancet, Roberto San Geroteo, Claude Held et Guy Rochel
    L’Escampette éditions



  • Roger Lewinter

    443784274.jpg« En tout être, il y a une étincelle, qu’il peut laisser s’éteindre ou entretenir jusqu’à ce qu’elle l’embrase tout entier. Pour le feu, cela ne fait guère de différence, mais cela en fait pour la vie qui s’éclaire ainsi. Servir le feu : retourner au feu. »
     
    Roger Lewinter
    Le centre du cachemire (roman aphoristique)
    Éditions Ivrea, 1998

  • Michel Deguy

    958709296.jpg« Vous y êtes vous n’y serez plus.
    Vous n’y serez bientôt plus vous n’y êtes déjà plus
    Soustrayez-vous. Le temps devient cosmique
    Vous  y êtes encore. Nous n’y serons bientôt plus
    Plus personne. Cela aura été      faites comme si nous y étions comme si nous n’y étions plus. »
    Michel Deguy
    À ce qui n’en finit pas (thrène)
    Coll. La Librairie du XXe siècle, Seuil, 1995

  • Thomas Braichet

    Jeudi Hélène Mohone, 48 ans, samedi Thomas Braichet, 30 ans. La même saloperie de maladie.

    1672352622.2.jpgPour Thomas Braichet il faut aller sur la page de Tapin qui lui rend hommage – il participait depuis plusieurs années à la revue Boxon avec Julien d’Abrigeon, Cyrille Bret, Gilles Cabut… – http://tapin.free.fr/thomas.htm

    Thomas Braichet avait publié deux livres sonores chez P.O.L, On va pas sortir comme ça on va rentrer en 2004 et Conte de F___ en 2007. http://www.pol-editeur.fr/catalogue/ficheauteur.asp?num=5818

    Thomas Braichet a une page sur MySpace, il faut la visiter, elle mérite amplement le détour et elle permet de comprendre sa conception de la poésie : www.myspace.com/batart

  • Pour accompagner Hélène Mohone

    Pour accompagner Hélène Mohone ces vers d’Anna Akhmatova – qu'elle aime tant  – et qui ici dans la présence de Marina Tsevatïeva, me fait penser à Hélène, à sa façon de penser l’autre. 

     

     

    «  … et je me suis retirée ici de tout,
    De toute espèce de bien terrestre,
    C’est une souche dans la forêt
    Qui est l’esprit, le protecteur de « ces lieux ».

    Dans cette vie nous sommes tous en visite ;
    Vivre, c’est tout juste une habitude.
    Sur les chemins de l’air je crois entendre
    Deux voix qui s’appellent l’une l’autre.

    Deux ? Mais près du mur de l’est,
    Dans les buissons de robuste framboise,
    Sombre, une branche fraîche de sureau…
    C’est une lettre de Marina.»

    1961, novembre
    à l’hôpital


    Anna Akhmatova
    Requiem
    Traduit du russe par Jean-Louis Backès
    Poésie/Gallimard, 2007

  • Hélène Mohone

    1044272263.jpg« L’enfant a le sourire tendre des idiots. Elle ne sait rien de celle partie grandir loin, amoureuse d’elle-même, sans autre soin d’elle-même que le crin rugueux de la folie folle folle folle sans l’enfant resté figé.
    Elle pourrait se laisser bercer par l’enfant devenu mère de cette autre grandie trop vie, fendue en deux comme une bûche. Elle la prendrait dans ses bras de petite fille et chanterait des berceuses tout au long du jour pour faire taire la maladie et aussi le chagrin d’être malade.

    L’enfant, mère de l’autre jetée sur la route, sidérée, racines arrachées, le singe à l’intérieur qui vole tout ce qu’il est possible de prendre. L’enfant berce, berce ce qui manque, le début du corps, heureux enfantin, sur les pistes du Sénégal oriental où les parents et les frères et sœurs forment les ombres tutélaires du présent.

    L’enfant n’en veut pas à l’autre triste insoumise à grandes dents voraces d’amour à se briser l’échine à rompre le pacte de vie.
    Elle la câline poupée nounours pas peur bien soigner le corps le masser caresser lui dire chut pas d’os rongé du chagrin dors enfant dors petite fille alouette grise
    L’enfant quitte le prénom d’Ishmaël. Elle peut commencer à nommer ce qu’elle avait oublié. Un autre prénom, bien à elle.

    Et l’enfant, petite, attend que l’autre grandie trop vite vienne guérir en mettant ses pas dans les seins, enfin visibles dans la poussière sèche du Sénégal.

    L’autre dit : « J’ai grandi vieille, tatouée par le servage. J’ai tenu la voile pliée par peur de déchirure, les cordages autour e mes poignets et la haute marée pour ne pas accoster ». Assise près de la fenêtre, dans une chambre d’hôpital, le bras caressé par un soleil d’avril trop chaud pour la saison, elle dit aussi : « Je ne sais pas qui je suis ».

    Elle pense à ses frères et sœurs sur les photos, les vêtements légers, les nattes et les calebasses, ses parents, la nourriture, le sol durci par la sécheresse, les paysages rouges, les corps dansant à la récréation, le chemin de la mission, l’école et les religieuses, robes grises et grands voiles blancs, les images pieuses, les moustiquaires et le bébé chimpanzé, la biche naine, l’œuf de crocodile éclos sous le soleil, le venin du serpent les crapauds venus de loin escalader les escaliers de la véranda

    Elle pense aux manteaux, à l’hiver, au corps étréci par le froid, aux rues grises, aux murs noircis par la fumée des voitures, les figures tristes, les chaises sur lesquelles il faut se tenir tranquille, le corps prisonnier en France, l’automne, l’absence, l’hiver, la vie à survivre, le rire, les baisers, l’amoureux, la maladie, l’opération, l’hôpital. Elle pense à elle enfant restée là-bas.

    Elle dit enfin, comme une prière : « Mes animaux ». »
    Hélène Mohone
    L’enfant africaine
    L’Amourier, 2006
     
    Nous accompagnerons demain lundi Hélène
    en l'église Saint-Martin de Villenave-d'Ornon à 14h30.
     
    Terres de femmes lui rend hommage aujourd'hui
     

  • Hélène Mohone

    « À ne plus jamais vouloir recevoir l'enfant qui s’enfuit.

    Cet enfant mains sur la bouche a bien un cri
    Un cri de métal planté à la racine du sommeil
    Ce cri là est d’enfance anciennement
    L’enfant qui dit encore n'est pas celui qui criait
    Pourtant ils sont de même assise
    L’un enfante l'autre qui n'en veut pas
    Il pleure pour celui-là qui crie toujours à l’intérieur de celui qui se souvient
    Non il crie non il pleure il crie et il pleure ils sont comme deux âmes qui s’étirent l’une fait mal à l’autre qui sent la racine tirer de son corps arracher déchirer l’ultime résistance à un chagrin plus grand d'être ainsi partagé entre celui qui crie et celui qui pleure
    Celui qui crie n’a pas la bouche ouverte
    Ce sont ses pieds ce sont ses mains ce sont ses yeux qui crient
    Il va là criant comme le mendiant
    Deux pieds deux mains deux yeux
    Et rien qui puisse remplir le trou
    Celui qui pleure a l’humidité fanée des cours d'eau
    Il n’est pas triste il ne sent rien
    Il suit l’écoulement du vide. »
    Hélène Mohone
    Le Cœur cannibale
    William Blake & Co. Édit, 2003
     766014836.jpg
    Hier soir, à la librairie Olympique, Jean-Paul Brussac recevait Sylvie Nève et Valérie Rouzeau pour une lecture de textes d'Hélène Mohone. Des extraits de Torpeur et de De Loin.

    Marie Delvigne s'est jointe à elles pour une lecture particulièrement forte de L'Enfant africaine

    L'émotion certes était palpable, et la présence perceptible en chacun de cette jeune femme courageuse, partageuse, volontaire, qui construisait patiemment une œuvre importante, y était pour beaucoup.

    il faut maintenant se battre pour que ses livres perdurent.

    Marc Pautrel s'est fait l'écho de cette soirée sur son blog.

    Florence Trocmé rend hommage à Hélène sur Poezibao. 

  • Hélène Mohone est morte

    "Un mort est en repos

        sa mémoire est tranquille

    soit consolé pour lui

        son souffle est reparti"

    Sagesse de Jésus Ben Sira dit Siracide, 38, 23

     

    145929740.jpgHélène Mohone est morte hier, 3 avril, à 13h 25. Son visage était serein. Elle était dans le coma depuis deux jours après des années à se bagarrer contre la maladie. Courageuse et joyeuse, elle apportait aux autres une paix rare car elle avait une vraie nature spirituelle.

    Elle venait de publier deux nouveaux livres, Torpeur aux éditions de la Cabane et De loin à l'Atelier de l'Agneau.

    Torpeur, dédié à un autre disparu récent, Michel Valprémy, est un livre énigmatique où l'on retrouve tous les thèmes d'Hélène, comme un au-revoir sans en avoir l'air. Je n'ai pas encore lu De loin.

    Une cérémonie aura lieu lundi à l'église Saint-Martin de Villenave-d'Ornon à 14h30 avant la crémation à Montussan. 

    Écrasé, épuisé par sa disparition, je ne puis que reprendre ce que j'avais écrit pour elle il y a un an, lors d'une lecture à la librairie Mollat.

    * * *

    Longtemps, j’ai cru qu’Hélène Mohone était née en Afrique.

    Et si elle a vécue au Cameroun, au Sénégal, et bien l’état-civil, les hasards de la vie de son médecin de père l’ont fait naître à Bordeaux.

    Plus tard elle s’est mise à écrire.

    Cette écriture, ce travail d’écriture, s’est, bien sûr, nourri de l’enfance en Afrique, mais aussi de ses séjours en Roumanie et en Nouvelle-Calédonie.
    Elle chante aussi – elle a même suivi aux conservatoires de Bordeaux, Saintes et Angoulème une formation de chant classique –, elle écrit pour le théâtre, elle fait des travaux plastiques épatants, et a suivi des cours aux Beaux-Arts. Elle a monté une association artistique « Reportage » qui proposait des expositions de peinture, des performances et des concerts, ainsi que des activités audiovisuelles. Bref, elle n’arrête pas.
    Elle vient de terminer De loin, un livre de poésie. Elle a écrit trois pièces de théâtre dont l’une, Si près des champs, a été retenue dans le répertoire des Nouvelles Écritures théâtrales à Paris en 2001. Elle a publié dans de nombreuses revues : L’Insulaire, 2001, Le Fram, L’Arbre à paroles, Le Journal des poètes, Poésie première, Épistoles de montagne, Le Passant ordinaire. Elle a obtenu une bourse d’encouragement à l’écriture du CNL dans la section Poésie.
    Elle écrit… l’écriture est une sacrée histoire avec laquelle on ne finit pas lorsque l’on s’y engage. Il ne fallait pas commencer. Si, il le fallait, écrivait Beckett. Oui. Il le fallait. Il le fallait cet engagement, cet entêtement, cette façon de ne pas baisser les yeux

    Le Cœur cannibale

    Lorsqu’elle a publié le Cœur cannibale – qui d’ailleurs a disparu de ma bibliothèque, si on pouvait me le rendre… d’avance  merci – en 2003 à la William Blake and Co., lorsqu’elle a publiée le Cœur cannibale donc, nous venions juste de nous croiser et ce livre m’a incité à l’approcher un peu plus.
    Étrange premier livre d’une étrange jeune femme que ce Cœur cannibale. Dans une langue rare, économe, chantante, proche de l'imprécation, scandée comme une danse des origines, c'est à la compréhension, à la connaissance, d’un monde très ancien et absolument nouveau, que nous invite Hélène Mohone, qui avait déjà publié un texte sombre et remarqué, Corpus triste, dans le n° 42 du Passant ordinaire, avais-je alors écrit dans Lettres d’Aquitaine.
    Bien plus, ce poème là inscrivait son auteur dans une tentative d’appeler le monde par son nom, le seul. D’épeler le monde et comment il nous contient, comment nous nous battons avec lui, comment nous le cajolons. Un livre qui ne parle pas à tort et à travers, mais, au contraire, resserre sa langue lentement autour de ce qui est essentiel en elle, en nous, ce qui nous fonde, nous empêche de disparaître.


    L’Enfant africaine

    En 2006 paraît L’Enfant africaine, sous-titré justement, je l’ai évoqué plus avant à propos du Cœur cannibale, Corpus Triste, ce second livre d’Hélène Mohone, embarque son lecteur dans un univers résolument personnel qui prend  sa clef à la hauteur des chants qui ont bercé son enfance africaine. Livre douloureux, livre résolument ancré dans ce qui fonde l’être, dans la douceur et les effrois de vivre, de grandir, de vieillir, dans les difficultés de la maladie (la maladie de la mort), livre où l’enfant souriant « sera là jusqu’à disparition ». « Elle – nous dit, la narratrice –, a cédé à la maladie avec volupté pour sentir à nouveau la vie avant la mort, sentir la vie atteinte nommer l’instant de vie avant la disparition. » Et voici la charnière, le point nodal, le point de rupture aussi de ce mince livre : l’enfant petite et l’enfant trop vite grandie sont ici réunies, assemblées, séparées, disjointes, non pas par la narration mais par la vie même. La souffrance de l’une est dans les joies de l’autre, le monde n’y peut rien, on vit avec soi-même jusqu’au bout et ici, seuls les singes nous réveillent et on peut fourrer ses doigts dans les « bonnes mamelles un peu racornies, aux poils drus et longs » de la maman  – parce que maman est partie et que papa tire les cheveux en les peignant. L’Enfant africaine est une longue histoire d’amour et d’abandon. L’exil, l’amour, la maladie y sont les révélateurs de racines perdues, pour qu’à la fin, l’espoir d’une réconciliation des corps et des âmes soit envisageable. Hélène Mohone publie là un livre salvateur et bénéfique dont on gardera longtemps à l’oreille le chant très beau modulé du plus primitif à l’étonnamment moderne. Une et multiple, l’enfant africaine d’Hélène Mohone déplie la mélopée des voix de sa souffrance.
    C’est un grand livre, c’est un livre qui nous réunit avec l’enfant en nous, qui nous permet de vieillir tout seul, c’est un de ces livres que l’on oublie pas parce qu’on est tenté souvent d’y revenir.
    Et c’est pour ça que j’aime Hélène Mohone et ce qu’elle écrit – ce qui est à mon sens la même chose – parce que j’y reviens toujours, parce que je recommence toujours et que, finalement, c’est recommencer qui est beau.

    • Bibliographie
    • De loin, Atelier de l'Agneau, 2008 
    • Torpeur, La cabane, 2007
    • L’Enfant africaine « corpus triste », L’Amourier, 2006
    • Le Cœur cannibale, William Blake and Co, 2003
    • http://helene.mohone.free.fr/

     

  • Hélène Mohone

    755675861.jpg« (ou est-ce perdu)
    je t’ai vu toi à aimer renoncer à cueillir ce qui restait jambes brisées j’ai ramassé les lettres les ai pliées tout assourdie avec l’enfant autrefois qui me ressemble ou est-ce perdu s’écoule la sangle des baisers au flanc crépu des amants à dégringoler vlan l’étendue repue du silence Amen grignotent les dents de souris sous l’oreiller les perles récitées en bafouillant perdu perdu perdu où est-ce caché »

    Hélène Mohone
    Torpeur
    La Cabane, 2007

    ESCALE DU LIVRE

    Sur une proposition
    de Sylvie Nève


    Lecture des textes
    d’Hélène Mohone

    par  
    Valérie Rouzeau
    Sylvie Nève


    Librairie Olympique
    23, rue Rode à Bordeaux
    (place du Marché des Chartrons)
     
    vendredi 4 avril
    à 18h 30

  • Jean Daive

    1438346196.jpg« Mais enfin un lit, même improvisé, n’est-il pas toujours un lieu que l’amour rend inaccessible, puisqu’il prescrit tout autre chose que le spectacle pour lequel il est préparé : dormir ? Nous dormons dans l’amour, en effet, mais nous introduisons un espace insoupçonné qui fait apparaître le véritable centre de la scène, la pure réciprocité. Je te caresse, tu me domines. Je te parle, tu me boudes. Je te touche, tu m’écartes. Cependant, si je ne suis qu’un point rose, je suis auprès de toi en proportion avec le ciel et la nuit où nous brillons. »
    Jean Daive
    Autoportrait aux dormeuses
    P.O.L, 2000